Le nouveau musée départemental Albert-Kahn, situé à Boulogne-Billancourt, est un équipement emblématique de l’ambition culturelle du Département des Hauts-de-Seine. Dans une réalisation signée du célèbre architecte Kengo Kuma, les visiteurs peuvent d’ores et déjà partir à la découverte d’un musée, de collections de photographies et de films exceptionnels, ainsi que d’un jardin patrimonial à scènes paysagères.
Par Sipane Hoh
Le programme est dense. Il comprend la construction d’un nouveau bâtiment de 2.300m² et la réhabilitation de 8 autres bâtiments, dont les 7 bâtiments patrimoniaux du site et l’ancienne galerie d’exposition. Le projet qui a été porté par le Département des Hauts-de-Seine, propriétaire depuis 1968 du site, vouait une meilleure conservation et valorisation des collections, mais aussi une présentation renouvelée et un accueil des publics conforme aux exigences d’un musée du XXIe siècle.
Musée départemental Albert-Kahn, nouveau bâtiment conçu par l’architecte Kengo Kuma © CD92/Olivier Ravoire
Musée départemental Albert-Kahn, nouveau bâtiment conçu par l’architecte Kengo Kuma © CD92/Willy Labre
Ancré dans son environnement
Le nouveau musée départemental Albert-Kahn constitue une institution culturelle de référence, tant au niveau national qu’international. Pour cela, il aura fallu se concentrer sur l’idée d’un équipement profondément ancré dans son environnement, d’un lieu tourné vers la sensibilisation du public à des problématiques sociales, environnementales et esthétiques, mais aussi concevoir un musée qui accorde une place centrale à la question du végétal et du vivant. Un sujet qui a été très cher au cœur de son fondateur, le banquier philanthrope Albert Kahn.
C’est en octobre 2012, dans le cadre d’un concours et parmi cinq projets, que la proposition de l’agence d’architecture Kengo Kuma & Associates a été retenue. Cette dernière, consciente de la relation particulière qu’Albert Kahn entretenait avec le Japon, a proposé la réinterprétation d’un élément traditionnel de l’architecture japonaise : « l’Engawa ». Ce qui signifie l’espace, en général conçu en bois, se trouvant devant la fenêtre ou les volets des différentes pièces dans les maisons japonaises. Il s’agit de l’élément conceptuel fort du projet qui répond favorablement au concept du musée-jardin et autour duquel se croisent les multiples thèmes forgeant l’identité du site. Ce geste fort de Kengo Kuma amorce un dialogue entre patrimoine bâti et parcs. Pour ce faire, l’architecte a eu recours à des matériaux comme le bois clair, le bambou ou encore le métal. L’ensemble est un concentré savant qui effectue un joli clin d’œil vers le passé, en utilisant les techniques traditionnelles japonaises en accord avec l’environnement.
Musée départemental Albert-Kahn, nouveau bâtiment conçu par l’architecte Kengo Kuma © CD92/Olivier Ravoire
Musée départemental Albert-Kahn, nouveau bâtiment conçu par l’architecte Kengo Kuma © CD92/Olivier Ravoire
Musée départemental Albert-Kahn, la Serre © CD92/Julia Brechler
Le bois à l’honneur
L’architecture du lieu est à la fois discrète et présente. Le visiteur s’aventure, à l’intérieur, à travers un jeu de rampe, en passant devant un jardin zen minimaliste. Kengo Kuma a conçu une entrée principale qui n'est ni directe ni frontale, pour freiner, selon les traditions japonaises, l'accès aux mauvais esprits. Cette manœuvre permet aussi d’oublier progressivement la ville et son brouhaha et de s’immiscer petit à petit dans la nature pour mieux l’apprécier. Une mise en scène adroitement orchestrée pour entamer une écriture architecturale accentuée par la déambulation et la contemplation du paysage.
La façade intérieure est rythmée par un délicat jeu d’écrans en bois et en aluminium. Les filtres de bois et de métal qui font office de persiennes sont positionnés selon quatre angles différents et de manière aléatoire. Encore un clin d’œil à l’architecture japonaise où ces éléments qui sont appelés Sudare permettent de créer l’harmonie entre deux espaces. Des petits détails qui viennent enchanter l’ensemble et façonnent l’architecture du musée Albert Kahn.
Les différents espaces d’exposition se caractérisent par la présence du bois de chêne et les murs aux teintes sombres, ce qui met en exergue la coloration du jardin. Au rez-de-chaussée du nouveau bâtiment, nous pouvons trouver l’espace d’accueil, la librairie-boutique, le café, le centre de documentation et la première partie du nouveau parcours permanent. Au premier étage, le visiteur découvre un espace de 600 m² dédié aux expositions temporaires, mais aussi le « Salon des familles ». Il s’agit d’un nouvel espace de découverte ludique des collections, en accès gratuit pour les enfants et leurs accompagnateurs. Un restaurant avec une terrasse ensoleillée donnant sur le jardin -et dont l’ouverture est prévue pour fin 2022- occupera le dernier étage de l’édifice. Ce dernier, constitué de 2 300 m² de surface dévoile une architecture vigoureuse, en cohérence avec le site. L’architecture de Kengo Kuma révèle avec tact tous les secrets du lieu.